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Interview de Louis Sébastien, Youmna Tarazi et Daniel Semporé, élèves du Cycle intensif


Youmna Tarazi

L’école du Jeu abrite depuis le mois de janvier un nouveau type de formation : le Cycle Intensif, destiné à des personnes désireuses d’approfondir et de consolider les fondamentaux du métier d’acteur.

Louis Sébastien, Youmna Tarazi et Daniel Semporé, tous trois stagiaires dans ce cycle, ont échangé, discuté et réfléchi, autour de certaines notions en lien avec le métier d’acteur, grâce notamment à cette question : « Qu’est-ce que cette notion évoque dans votre propre expérience, que ce soit dans l’école ou en dehors ? »

Youmna Tarazi, élève du Cycle Intensif à L'Ecole du Jeu

(Ré)apprendre les bases

Daniel – J’avais très peu de bases en théâtre. Les apprendre, c’est commencer par sentir ce que mon cœur et mon corps me disent, plutôt que de passer par ma tête. La base était celle-là pour moi, plutôt que de travailler immédiatement sur des scènes.

Youmna – Pour moi, c’est offrir un espace à mon corps, qui est mon outil de travail, pour comprendre par où passent l’émotion, l’envie, le contact avec le partenaire et le public… C’est un espace-temps que je m’accorde dans l’école. C’est comme si je laissais de la place à mes propres bases pour émerger, plutôt que d’apprendre quelque chose qui ne viendrait pas de moi.

Louis – Pour moi, il s’agirait plutôt de « réorganiser la structure ». Au fur et à mesure des années, j’ai acquis plein de choses, et là, c’est une année pour tout revoir : tu prends un temps pour restructurer tout ça, pour solidifier ce socle.

Youmna – C’est aussi réapprendre ce que je savais quand j’étais enfant, pour désapprendre ce qui a été construit dans le fonctionnement d’adulte.

Chercher pour soi

Louis – Quand tu travailles, il y a toujours un objectif très clair, que ce soit une présentation publique, un film ou une pièce. Tu es dans quelque chose d’efficace, où l’on attend un résultat. C’est un luxe d’avoir un temps pour soi pour construire, s’améliorer.

Daniel – Ça a un rapport avec la problématique de savoir ce que l’on veut.

Youmna – C’est mettre de coté de qui est urgent, ce qui est efficace, pour se concentrer sur l’essentiel. C’est me permettre de m’extraire du monde professionnel pour revenir à cet essentiel, et pouvoir retourner dans ce monde avec quelque chose de plus ajusté et de plus affirmé par rapport à ce qui me tient à cœur.

Daniel – C’est assumer ce que l’on veut. D’abord se faire plaisir, plutôt que de dire « Il faut que ce soit comme ça ».

Youmna – Le cycle intensif permet de chercher sur soi. C’est très intime, très personnel, et ça peut d’ailleurs se faire en dehors des cours. Je me suis offert la possibilité d’avoir du temps en dehors des cours pour que quelque chose puisse avoir le temps d’émerger. C’est important pour moi d’appréhender le cycle intensif avec ce temps à côté des cours.

Daniel Semporé, élève en Cycle Intensif à l'Ecole du Jeu.

Daniel Sempore, élève en Cycle intensif à l'Ecole du Jeu

Monde professionnel

Youmna – Pour moi, c’est la panique ! Je viens d’un autre monde professionnel, et j’ai toujours fait du théâtre avec des amateurs. Le cycle intensif est donc pour moi une transition pour aller dans le monde professionnel théâtral. C’est l’inconnu !

Louis – Je suis venu ici avec une démarche double : j’avais envie de prendre du temps pour jouer, avec pour objectif de m’améliorer, et donc de travailler plus en tant que comédien. Cela dit, que je fasse quelque chose gratuitement ou que je le fasse payer, je le fais avec le même investissement. Ce qui caractérise le mot « professionnel » est qu’il y a un salaire derrière ce que l’on fait. Et je trouve ça bien quand le mot « professionnel » coïncide avec mes envies.

Daniel – J’ai travaillé pendant un an, et me suis dit qu’il fallait que je fasse une formation pour être pris au sérieux. J’aime bien le monde professionnel, parce que c’est un test, une mise en pratique de ce qu’on a appris : il faut savoir rassembler toutes ses compétences, et tout donner dans un temps donné, comme à un casting, par exemple.

Youmna – C’est la suite directe de l’apprentissage : c’est dans ce monde qu’on continue à apprendre, et c’est donc pour cela qu’on doit avoir des bases solides pour faire face aux situations inconnues. Le monde professionnel peut être très constructif : c’est l’incarnation de la passion.

Daniel – Et puis certaines personnes font attention à la formation, comme dans tout secteur d’activité. Les intervenants de l’école font référence chacun dans leur métier. Dans le monde professionnel, il y a des personnes qui savent tout de suite, en sachant d’où l’on vient, que le type de jeu que l’on pratique passe par nous plutôt que par l’extérieur.

Autonomie de l’acteur

Daniel – J’en ai plus que lorsque j’ai commencé la formation, et j’espère en avoir encore plus dans trois mois. Pour moi, cela signifie « faire attention à ne pas se conformer aux cadres ».

Louis – Pour moi, être comédien, c’est savoir mettre ses compétences « au service de ». L’autonomie, à ce moment là, c’est avoir suffisamment de bases solides pour pouvoir répondre aux demandes, quelles qu’elles soient.

Youmna – Pour moi, c’est avoir conscience de soi, de ses limites. Quels sont les outils qui me conviennent le mieux par rapport à ce que je connais de moi pour répondre à un cahier des charges extérieur ? C’est avoir une connaissance de moi en affinement perpétuel pour répondre avec cette disponibilité dont parlait Louis.

Louis – Dans certains contextes professionnels, notamment au cinéma, il est rare que l’on soit très dirigé : on te donne peu d’indications, avec lesquelles il faut composer. Ce sont là des endroits où l’on doit avoir des bases solides et une bonne formation.

Youmna – Mais j’ai déjà l’impression de vivre ça avec le Cycle Intensif : les professeurs ne viennent pas nous dire quoi faire, mais nous transmettent leur expériences et les connaissances qu’ils en ont retiré… À nous d’être autonomes et responsables pour en tirer le meilleur !

Louis – Nous ne sommes pas considérés comme des enfants. On est là, on sait pourquoi on est là, et à nous de nous investir pour en tirer le maximum !

Daniel – Il faut que ça vienne de soi, que ce soit pendant les cours ou ailleurs. J’aime avoir cette indépendance de chercher, de travailler sur des projets qui me plaisent, qu’ils soient payés ou non.

Youmna – Une image me vient : si quelqu’un escalade une montagne, personne ne pourra le faire à sa place. C’est à nous de savoir à quels endroits placer nos appuis !

Louis – L’autonomie de l’acteur, ce serait d’avoir des compétences multiples, qui peuvent passer par le corps, par le chant… Le passage par l’école participe à ça : faire appel à plusieurs domaines qui à priori seraient séparés. Tout va ensemble !


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