Interview de Clara Hédouin et Odile Lavie - " Le Training organique de l'interprète. "
- Claire Duchêne
- 14 janv. 2013
- 3 min de lecture

Directrice et professeur au sein de l’École du Jeu, Delphine Eliet a donné en novembre un stage de trois semaines axé sur le training de l’acteur. Clara Hédouin et Odile Lavie, « ex-deuxièmes années » de l’École ont participé à cet entraînement intensif. L’occasion pour nous de les interroger sur ce temps de travail très particulier.
Claire Duchêne, pour l’École du Jeu : Pourquoi avoir fait le stage « L’acteur-créateur : training organique de l’interprète » dirigé par Delphine Eliet alors que vous aviez suivi la deuxième année du Cycle long de l’École du Jeu l’année dernière ?
Clara Hédouin : Le cycle long est une année de formation sur le temps long. Là, l’idée était de travailler intensément avec Delphine pendant trois semaines. Pour moi, c’était une manière de revenir aux fondamentaux sur une durée plus courte, donc de manière plus intensive.
Odile Lavie : C’était très dense. Ce qui m’intéressait dans ce stage était le fait qu’il ne soit axé que sur du training. Il n’y avait pas de désir de résultat, comme l’on peut en attendre lorsque l’on travaille pour les concours des grandes écoles. C’était du travail pur qui me permettait d’avancer en tant qu’actrice.
C. H. : Maintenant que l’on essaye d’avancer, de faire notre route tout seul, proposer de l’entraînement pur pendant trois semaines n’a donc pas la même place qu’un enseignement sur la longue durée.
O. L. : C’est une démarche professionnelle. Il y avait une nécessité de travailler.
C. H. : Il n’y avait pas d’horizon particulier : chacun s’en créait un propre, selon ses envies et ses besoins. Pour moi, avancer à ce moment-là voulait dire « oser être perdue ».
O. L. : Moi, je travaillais le fait de « travailler pour moi ». Je me donnais des objectifs chaque jour.
C.D. Quelle est la chose la plus importante que vous ayez apprise au cours de ce stage ?
C. H. : Être au service de l’autre, donner à des spectateurs : c’est de ça dont il a été le plus question pour moi.
O. L. : Ce que j’ai le plus travaillé a été mon fil rouge de départ : travailler pour moi. J’ai quitté le stage avec la satisfaction d’avoir travaillé pendant trois semaines sans m’arrêter.
C. D. Entre le début et la fin du stage, qu’est-ce qui a changé par rapport à votre pratique d’actrice ?
O. L. : J’ai compris cette notion « d’acteur-créateur » que Delphine utilise. Mon projet de stage était le suivant : « Je souhaite être libre pour pouvoir exprimer ce que je veux, comme je le veux, avec courage. » Les deux derniers jours, j’ai compris cela en travaillant le lâcher-prise dans la tête. Je connais maintenant les endroits qui doivent être débloqués dans ma tête, que ce soit purement physique ou de l’ordre de la concentration, pour arriver à cet état de liberté, de nécessité d’expression.
C. H. : J’ai appris qu’être acteur est aussi accepter d’avancer en étant vulnérable, sans avoir tout réglé. Ce qui donne de la force à l’acteur est de ne pas avoir peur d’être atteint par les choses. C’est ce qui a le plus changé pendant ces trois semaines : accepter d’avoir peur. Ce n’est pas gagné, mais ça a avancé.
C. D. Comment se stage vous influence-t-il dans votre vie professionnelle ?
O. L. : Concrètement, je me suis réapproprié mon corps. Aujourd’hui, je bouge différemment : je suis beaucoup plus libre. Je joue aussi différemment : je retravaille actuellement une pièce que nous avions créée avant le stage, et j’ai redécouvert mon personnage. Je suis certaine que le stage m’a aidée parce que nous travaillions très physiquement. Je suis plus libre de réagir à tout ce qui se passe sur un plateau, comme j’en ai envie.
C. H. : Dans les répétitions, je suis plus simple et plus engagée.
C. D. Poursuiviez-vous le travail entamé pendant le stage ?
O. L. : Je sais quels exercices utiliser pour me mettre en état de travail. J’utilise le training que nous avions conçu pendant le stage : une demi-heure de training personnalisé, au bout duquel nous devions être prêts à jouer.
C. H. : Je repère mieux les moments où je me referme, où je fais en sorte de maîtriser les choses. Je fais des trainings lorsque je sens le besoin de me « déverrouiller », lorsque je perds en innocence.
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