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INTERVIEW de Mikaël Serre sur le Quantique des Quantiques en collaboration avec Abou Lagraa


MLB : Comment s’est passé ta collaboration, en tant que metteur en scène, avec le chorégraphe Abou Lagraa?

Mikaël Serre : C’est très intéressant de se confronter à d’autres esthétiques, à d’autres questionnements, à une œuvre même que je n’aurais pas choisi naturellement.

Ce qu’il y a de bien, quand quelqu’un te fait une proposition, c’est que tu dois travailler sur quelque chose auquel tu n’aurais pas pensé. Parfois, qui ne correspond même pas à tes questionnements du moment.

Tu es obligé de sortir un peu de toi-même.

C'est la première fois que je travaille avec un texte, et un chorégraphe qui écrit aussi beaucoup.

Bien sûr, Abou est quelqu’un qui travaille le mouvement avec les danseurs et les improvisations. Mais il a quand même son mouvement, une ligne très précise, une exigence dans le geste, une écriture.

MLB : Tu n’as pas choisi le Quantique des Quantiques ?

Mikaël Serre : Non c’est une proposition d’Abou, qui voulait, lui, se confronter au Quantique des Quantiques en tant que texte. Il aurait pu le prendre comme base de travail avec des danseurs.

Mais il avait comme projet, de longue date, de travailler sur le texte avec des comédiens, des danseurs et donc un metteur en scène.

C’était aussi un défi pour lui, une manière de se renouveler.

Au début il pensait à un acteur et une actrice, ce qui est un peu classique. Un homme et une femme. Le Quantique des Quantiques : Une femme qui rêve d’un homme ? De deux hommes ?

J’ai eu beaucoup de mal avec cette idée : un homme et une femme sur scène. Je me suis rendu compte que je faisais un blocage, je ne trouvais ni l’acteur, ni l’actrice. J’ai réalisé que la dualité homme-femme ne m’intéressait pas vraiment.

Donc, j’ai compris que ça serait deux actrices : quelque chose d’universel, pas sexué.

Pour pas qu’on tombe juste dans le rapport amoureux. Très beau, mais banal.

Quand j’ai compris ça, et que j’ai proposé à Abou les deux actrices - ça m’a paru un peu comme une évidence- j’ai trouvé Gaya et Maya.

MLB : Dans ce projet, quel été ton rôle dans la création ?

Mikaël Serre : Au départ, on ne sait jamais. Parce que la mise en scène ne se réduit pas à la direction d’acteur : c’est aussi la question du sens et des situations.

Quand on a commencé, très vite, on a réunis les acteurs et les danseurs sur le plateau.

Les deux ou trois premières semaines, on regardait ce que faisaient les danseurs et inversement, les danseurs venaient voir ce que je travaillais avec les actrices. On créait un peu chacun de notre coté. Souvent l’après midi on se montrer un peu les choses. Puis, très vite, n a travaillé tous ensemble.

Par exemple au début - le thème des femmes qui sont traversées par des pensées, des rêves- ça, c’est typiquement de la mise en scène. Parce que le Quantique des Quantiques est écrit comme un chant, du coup, pour les actrices il faut trouver un ancrage, quelque chose de concret, un sol, des situations.

Il y a un travail à faire pour éviter que ce soit une simple parole poétique, éthérée, un peu vide.

Nous, on construisait, ce que le spectateur ne peut pas toujours détecter, pour éviter que les actrices soient larguées sur scène, à dire des jolies mots et des jolies phrases.

Ca fait partie de la mise en scène : des situations, des motivations de jeu, qui sont intérieures, très personnelles, liées à une pensée qu’on a sur le texte.

MLB : Quelles ont été tes références pour aborder cette œuvre ?

Mikaël Serre : Déjà l’amour. Toujours, à chaque fois, se poser la question : qu’est ce que c’est que cet amour ? Comment le traduit-on maintenant ? La Charte Européenne, c’est une application concrète de ce sentiment là. Par exemple, il y a eu de la part d’Abou, la situation de Ludovic qui se fait cracher dessus. C’est la question des homosexuels dans les pays du Maghreb, en Algérie. C’est un questionnement concret : qu’est ce qu’on fait des frustrations, des non-dits ? Des rejets ?

Il y a aussi des thèmes qui sont plus ou moins présent dans le Quantique, par exemple la scène du viol. Ce n’est pas explicite, mais quand même, c’est le tableau de la Sulamite.

MLB: Est-ce que tu as dirigé les danseurs ?

Mikaël Serre : Non, parce que c’est trop « technique ». Evidemment, il y a les retours dans lesquels je peux partager ce que je vois, ce que je trouve juste et décrire des états. Tout comme Abou peut dire s'il a trouvé, chez les actrices, un manque de clarté dans le jeu par exemple.


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